Usage sécurisé et durable des motos en Afrique : Les fortes recommandations de la FIA Foundation et ses partenaires
L’urgence de prendre des mesures pour mieux faire face à la croissance rapide des motos en Afrique subsaharienne avec un accent particulier sur la sécurité des êtres humains préoccupent plusieurs organisations de taille notamment la FIA Foundation, l’ONG Amend, la Fédération internationale de motocyclisme (FIM) et autres partenaires comme l’Action pour les victimes de la route (AVR)-Togo. Dans cet élan, à travers un grand rapport suite à une étude, ces structures ont rendu public leurs préoccupations ce vendredi 27 janvier à Lomé.
Intitulé « les moteurs du changement : des motos sûres et durables en Afrique subsaharienne », ce rapport de près de 100 pages examine d’abord le boom de la moto sur le continent Africain y compris évidemment le Togo. Il formule ensuite des recommandations et enfin propose un programme d’action visant à maximiser les avantages des motos tout en gérant et en minimisant leurs risques. Avantages socio-économiques, défis d’une réglementation et d’une formation efficace et appropriée, nécessité de promouvoir la disponibilité et l’utilisation d’équipements de protection et de technologies de sécurité de bonne qualité, la prise en compte des motocyclistes dans la conception des routes tout en soutenant la transition des motocyclistes à moteur à essence vers les motocyclistes électriques ; tout semble être dit dans ce rapport et dans le cadre de cet article, la rédaction de votre journal (www.lepoint-actu.tg) développera plus l’aspect recommandation.
Lors de l’introduction de ce rapport, Rita Cuypers, Directrice des partenariats à FIA Foundation, a fait savoir que l’utilisation des motocycles (véhicules à deux et ou à trois roues) procure des avantages aussi bien au plan social qu’économique. Cependant, l’Afrique doit s’armer de courage pour organiser mieux le secteur car il y a trop de dangers et trop de pertes humaines suite à l’utilisation des motocycles.
Les motocyclistes représentent plus de la moitié des décès sur la route, et jusqu’à 70%, dans de nombreux pays d’Afrique subsaharienne ; Il y avait 27 millions de motos immatriculées en Afrique subsaharienne en 2022, contre 5 millions seulement en 2010 ; les motos sont devenues des sources importantes d’emploi informel, 80% d’entre elles étaient utilisées comme taxis ou pour des services de livraison. « Le port normalisé du casque est le moyen le plus efficace de réduire jusqu’à 72% les traumatismes crâniens des motocyclistes et jusqu’à 39% les décès (selon l’OMS) ; il est nécessaire de légiférer et de faire respecter les règles de sécurité pour les motocyclistes et les passagers, ainsi que de mettre en place des normes certifiées et des installations de test solides ; les systèmes de freinage antiblocage (ABS) peuvent réduire les accidents mortels de près d’un tiers. L’ABS imposé par le gouvernement sur les nouvelles motos, comme cela a été récemment introduit en Chine et en Inde, aurait un impact significatif ; la conception des routes doit prendre en compte la sécurité des motocyclistes, le déploiement de la réduction de la vitesse et la conception d’une infrastructure appropriée ou adaptée », renseigne-t-on.
Pour le Directeur exécutif de l’AVR-Togo, Otto Günther Kpégoh, « nous (des pays de l’Afrique subsaharienne : ndlr) avons été confrontés ces dernières années à la problématique de l’offre et de la demande en matière de mobilité ; la nécessité a ouvert la porte à l’émergence des deux roux au service du transport public et privé ». Cela a entraîné du positif comme du négatif et c’est cet aspect négatif qui se concrétise par les accidents de circulation en nombre et en gravité qui préoccupe dans ce rapport, souligne Otto Günther Kpégoh qui invite tous les acteurs concernés à donner un sens réel au risque et voir même quel regard porter sur la professionnalisation des taxis-motos.
S’il n’existe pas d’approche unique pour gérer les motos en Afrique, à travers ce rapport les recommandations sont les suivantes :
Intégrer les motos dans une politique de transport sûre, durable et équitable
La politique de transport actuelle dans de nombreux pays africains est discriminatoire à l’égard de la majorité de la population, en favorisant la minorité aisée qui peut se permettre de conduire des voitures individuelles. Cette situation entraîne de nombreux problèmes, notamment les embouteillages, la pollution, les blessures, la mauvaise santé et le manque d’opportunités. Pour permettre aux pays, aux villes et aux personnes de prospérer, les gouvernements doivent adopter des politiques de transport et de mobilité sûres, durables et équitables. Ces politiques doivent favoriser le développement des transports en commun, encourager la mobilité active face aux voitures individuelles, et adhérer à l’approche du Système sûr de la sécurité routière. Les motos continueront à jouer un rôle dans le transport en Afrique à l’avenir, elles doivent donc être intégrées dans des politiques de transport et de mobilité améliorées. Les conducteurs de motos-taxis doivent être respectés en tant qu’usagers de la route et prestataires de services. Il est de ce fait recommandé de prévenir l’augmentation incontrôlée du nombre de motos. Les gouvernements devraient contrôler cette augmentation en agissant à la fois sur l’offre par exemple en réglementant le secteur des motos commerciales et sur la demande par exemple, en proposant des modes de transport alternatifs, comme les transports en commun et les infrastructures pour la marche et le vélo. Il est question évidemment de fournir un environnement sûr, durable et équitable.
Si conformément aux recommandations internationales, la majorité des pays africains ont créé des organismes gouvernementaux responsables de la sécurité routière et élaboré des stratégies nationales de sécurité routière, la réalité est malheureusement tout autre chose ; la gestion de la sécurité routière dans de nombreux pays reste non coordonnée et inefficace.
Augmenter l’utilisation de casques standard de bonne qualité
L’utilisation généralisée de casques de bonne qualité pourrait sauver des milliers de vies. Cependant, il faut reconnaître que pour y parvenir, une approche stratégique est nécessaire qui coordonne de nombreux éléments et qui peut prendre de nombreuses années. Les efforts visant à accroître le port du casque doivent se concentrer sur les passagers aussi bien que sur les conducteurs, et cela peut inclure l’obligation du port du casque pour les enfants.
Donner la priorité à la formation, aux tests et à l’octroi de permis de conduire
Une formation appropriée dispensée par des formateurs qualifiés jouera un rôle clé dans l’amélioration de la sécurité des motos. Des recherches menées dans quatre pays africains ont montré que là où les taux de formation officielle des motocyclistes étaient plus élevés, la proportion de motocyclistes et de passagers impliqués dans des accidents était plus faible. Il est question essentiellement d’élaborer des normes de formation pour les motocyclistes avec un module pratique ; d’accroître la disponibilité des formations et des examens abordables pour les motocyclistes ; d’adopter une approche par étapes pour développer la formation ; inclure les questions de genre dans la formation des conducteurs de motos-taxis.
Assurer l’aptitude à la circulation des motos
Sur ce point, la FIA Foundation et partenaires estiment qu’il est nécessaire de fixer et faire respecter des normes de sécurité minimales pour les motos ; d’introduire des exigences pour les systèmes de freinage antiblocage sur les motos ; de lier la formation pratique aux examens et aux permis de conduire ; d’inclure les premiers secours dans la formation des motocyclistes ; d’effectuer des contrôles techniques réguliers ; d’inclure le contrôle technique
dans la formation des conducteurs.
Prendre en compte les motos dans la planification, la conception et l’entretien
La prise en compte des motos dès la phase de planification, l’inclusion des motos dans les manuels d’ingénierie routière, l’entretien du revêtement des routes, la protection des piétons et les autres usagers vulnérables de la route, la poursuite des recherches sur les infrastructures dédiées aux motos sont ici concernés.
Réglementer le secteur des motos commerciales
Il s’agit de plusieurs éléments sur lesquels il faut se baser. Dans tous les cas, les restrictions d’exploitation doivent être fondées sur le contexte, ciblées, proportionnées et cohérentes avec les objectifs plus larges de gestion du trafic.
Par ailleurs, il faut formaliser et soutenir les associations de motos-taxis, renforcer la mise en application de la réglementation.
Réglementer le secteur des applications de covoiturage et de livraison
Il s’agit d’optimiser le potentiel des applications en matière de sécurité personnelle ; De développer de solides relations entre le régulateur et les entreprises qui gèrent les
Applications ; entre autres.
Sensibiliser les autres usagers de la route
Soutenir des opportunités pour les femmes motocyclistes ; promouvoir et soutenir l’innovation ; partager les données anonymes avec le gouvernement ; mener des campagnes de sensibilisation pour les passagers et les autres usagers de la route ; …
Permettre une transition sûre vers les motos électriques
Les motos électriques peuvent avoir des effets bénéfiques sur les environnements urbains, la santé des personnes et le climat. Les gouvernements devraient soutenir la transition vers l’électrique, mais ils devraient trouver un équilibre entre les avantages et les mesures visant à réduire les risques pour la sécurité routière. Les recommandations sur la sécurité routière et les motos électriques sont les suivantes : développer et adapter la législation sur la sécurité routière pour couvrir les motos électriques ; soutenir la recherche sur les motos électriques et la sécurité routière ; définir des politiques pour promouvoir les motos électriques ; assurer un approvisionnement stable en électricité ; augmenter l’utilisation d’électricité propre provenant de sources renouvelables ; fixer des tarifs d’électricité plus bas pour les motos électriques ; normaliser les batteries et autres infrastructures de recharge ; minimiser les risques liés aux batteries ; développer une main-d’œuvre qualifiée ; mener des campagnes de sensibilisation ; mesurer la pollution de l’air des motos existantes.
Par ailleurs, les responsables dudit rapport disent constater, toutefois, avec joie que les motocyclistes eux-mêmes dans la région ont entrepris un travail d’amélioration de la sécurité, travail abattu par des associations à l’instar de boda boda, qui a été reconnu. « L’attention se porte à juste titre sur les gouvernements qui doivent relever le défi de rendre le motocyclisme en Afrique plus propre, plus sûr et plus accessible ».
Ali Legrand